Cours de théâtre : la plastique

Antony, d'Alexandre Dumas. Bocage et Marie Dorval dans la scène finale

Antony, d’Alexandre Dumas. Bocage et Marie Dorval dans la scène finale

La plastique, une communication non verbale qui raconte une histoire, au théâtre comme dans la vie

Que ce soit pour jouer avec un accessoire ou pour exprimer un sentiment, la plastique, la gestuelle et la position  par rapport aux autres personnages en disent souvent plus long que le texte et s’ils le contredisent, ce hiatus est signifiant.

Qui n’a pas reçu une fois dans sa vie l’offense de quelqu’un qui tend la main pour dire bonjour tout en regardant ailleurs et en détournant le corps?

Les trois politesses du comédien : se faire entendre, se faire comprendre, se faire sentir.

Les trois armes du comédien : son corps, son esprit et le texte de l’auteur (si le texte n’est pas bon, le comédien peut compenser par un état d’esprit)

De l’art de jouer avec son corps : la plastique, exemples

Tragédie : immobilité, harmonie, grâce et aura.

Corps face à face avec celui du partenaire : on s’offre ou on s’oppose à lui.

Chaque personnage a sa propre plastique : pour composer un personnage et faire passer des idées différentes, il faut réinventer sa plastique propre.

En principe, on regarde son partenaire en début et en fin de phrase.

Quand on passe devant quelqu’un, le regarder avant d’arriver à lui puis après être passé. De même si quelqu’un passe devant soi, ne pas reculer mais « l’aider à passer » en l’accompagnant du regard et du corps (sauf si on a dans l’intention de l’empêcher de passer.

Pour tomber : plier une jambe, faire comme si on s’asseyait puis se laisser tomber de la façon choisie.

Pour s’asseoir : tout contracter au-dessous du bassin, décontracter une des jambes du genou au bassin (pas le mollet), sentir la chaise avec cette jambe avant de s’asseoir.

Pour marcher : soulever une jambe en pliant, la tendre à l’oblique avant, poser les orteils au sol puis la plante du pied, ce qui dégage la jambe arrière du poids du corps.

– Au théâtre, comme à cheval et comme dans la vie, pour ne pas tomber et pour avoir de la présence, regarder haut et loin devant soi.

– Lorsqu’on est sur scène pour dire un poème ou une fable, s’appuyer sur une seule jambe, l’autre restant libre et prête à se déplacer.

Pour enlever son chapeau: démultiplier le geste en levant d’abord le coude.

Ne jamais aller tout droit d’un point à un autre sur un plateau, mais les écarts à la ligne droite doivent être motivés.

Toutes les transformations physiques ou d’habillement doivent être utiles à l’impression que l’on veut faire: par exemple, on ne peut pas jouer un connard avec les manches relevées, car les mains dégagées et qui jouent donnent un air d’intelligence. Un raie au milieu donne un air triste et de vieux con raisonneur.

Vulgarité : se pencher en avant lorsqu’on engueule quelqu’un ou penser au pli de son pantalon ou de sa jupe lorsqu’on s’assied.

– Lorsque vous jouez avec un accessoire, démultipliez votre geste : par exemple pour enlever un chapeau, levez d’abord le coude.

Changements d’axe

ce sont les changements d’axe qui permettent les jeux avec l’autre. Ne jamais avoir la tête, le corps et les yeux dans le même axe (sauf exception voulue).

Essayez les 27 possibilités de combinaison des trois axes. Et dans le corps lui-même, on peut encore jouer sur les positions de bras et des jambes.

Sentiment très fort : tête de face, axe du regard à gauche et axe du corps vers le droite (ou l’inverse);

sentiment fort : tête et regard dans le même axe, axe du corps décalé.

sentiment faible, regard, tête et corps dans le même axe.

Louison d'Alfred de Musset

Louison d’Alfred de Musset

Pour un sentiment donné, travaillez des gestuelles différentes

selon le geste ce sentiment n’exprimera pas la même chose.

Sur la gravure, Louison tient une clef. Imaginez la même scène avec la même position du bras mais le regard posé sur l’homme et non sur la clef, ou encore avec le bras tendu, ou replié sur la poitrine ou derrière le dos, ou au-dessus de la tête, le tout combiné avec un regard, sur la clef, sur l’homme ou vers le devant de la scène. Découvrez la variété de ce que vous pouvez ainsi exprimer. Regardez les jeux de regards dans La Balançoire de Renoir, une vraie leçon de théâtre

– Le sentiment passe du corps à l’oeil, si c’est le corps qui joue, l’oeil joue le rôle de guide. Si c’est l’oeil qui joue, le corps reste tranquille : ne pas faire marcher tous les sens à la fois.

– Sur le plateau respecter les positions hiérarchiques des personnages : on de se positionne pas de la même façon pour parler d’égal à égal ou pour marquer une supériorité.

– la femme tourne la tête d’abord et les hanches suivent, l’homme tourne d’abord le bas de corps et la tête suit.

Lorsque j’ai travaillé sur la communication non verbale à La Villette, j’ai eu accès à une étude qui portait sur le charme:

1 – On plaçait successivement sur scène un certain nombre de femmes dans une position statique, devant une assemblée d’hommes : la femme reconnue comme étant la plus séduisante était celle dont aucun élément (regard, tête, corps, membres) n’était dans le même axe qu’un autre.

2 -On plaçait successivement sur scène un certain nombre d’hommes dans une position statique, devant une assemblée de femmes : l’homme reconnu comme étant la plus séduisant était celui dont tous les  éléments (regard, tête, corps, membres) étaient dans le même axe, stable, face à l’assemblée.

La Poseuse de profil de Georges Seurat - Musée d'Orsay

La Poseuse de profil de Georges Seurat – Musée d’Orsay

Pour perfectionner votre expérience, regardez les gens s’asseoir

La manière de s’asseoir est très révélatrice de la personnalité. Comment vous asseyez-vous?

Avant de vous asseoir, lissez-vous votre jupe ou votre pantalon, regardez-vous le siège qui vous tend les bras?

Vous vous asseyez parce que vous êtes fatigué ou parce que vous avez peur d’être fatigué?

Vous vous asseyez sur le bord du siège ou au fond, précautionneusement ou  en vous laissant tomber.

Étes-vous prêt à bondir si nécessaire ou bien tomberiez-vous si on retirait la chaise?

Je suis sûre qu’en observant autour de vous, vous pourrez enrichir cette typologie. Classez tous ceux que vous connaissez selon la manière dont il s’asseyent et trouvez les points de caractères communs.

Voir aussi: théâtre, une synthèse de dix ans de cours

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