En concevant le Passage des dates au Musée d’Orsay, j’avais proposé le principe de choisir Les 9 événements clefs de chaque année entre 1848 et 1914, événements politiques, scientifiques et techniques, sociaux et culturels.
Voici les 9 événements qui avaient été sélectionnés pour l’année 1914.
Assassinat du directeur du Figaro
Assassinat de l’archiduc à Sarajevo
Assassinat de Jean Jaurès
Vote de l’impôt sur le revenu
Déclaration de guerre: la guerre de 14-18 ou la fin du XIXe siècle
L’Amérique (Amerika) de Franz Kafka
Le browning de Madame Caillaux abat le directeur du Figaro
Elle ne voulait pas tuer Gaston Calmette, le directeur du Figaro ; il lui aurait suffit de le blesser pour lui donner une leçon mais… le coup est parti tout seul, ou presque, sur un mouvement convulsif, provoqué par l’affolement, l’exaspération et divers incidents survenus au cours de l’attente !
Il est vrai que, depuis un certain temps, le directeur du Figaro ne ménage pas le mari de Madame Caillaux, alors Ministre des Finances. Il reproche à Monsieur Caillaux les contacts secrets qu’il aurait eus avec l’Allemagne lorsqu’il était président du Conseil, son projet de loi sur l’impôt général sur le revenu qu’il essaie de faire voter au Sénat, de couvrir enfin un financier véreux ; et pour couronner le tout le Figaro publie une lettre écrite par Caillaux fort embarrassante pour le signataire.
« Il n’y a plus de justice. Le revolver seul, pouvait arrêter la campagne », dit Madame Caillaux après le meurtre. Le ministre démissionne, mais la campagne ne s’arrête pas là. Dans les rues, dans les salons, dans les réunions politiques, on prend parti pour ou contre Madame Caillaux, et souvent avec violence.
Assassinat de l’archiduc François-Ferdinand, neveu de l’empereur d’Autriche-Hongrie Joseph 1er et héritier du trône: place au processus inexorable
Le 28 Juin 1914, l’Archiduc et sa femme visitent Sarajevo. Tout est prêt pour enflammer l’Europe. Les Serbes ont juré la mort du prince héritier du trône de Hongrie. Ils veulent rester indépendants et ne veulent pas du système fédéraliste instituant un état slave semi-autonome qui les empêcherait d’attirer à eux les Croates, Slovènes et Bosniaques.
La Main Noire qui a des relations avec les services de renseignements de l’état-major, organise l’assassinat avec succès.
Réaction immédiate de l’Autriche-Hongrie : l’occasion ou jamais de régler son compte à la Serbie. Elle envoie un ultimatum auquel la Serbie ne peut répondre par l’affirmative, le dernier point prévoyant une enquête menée par les policiers autrichiens sur le territoire serbe. Le 28 Juillet, l’Autriche-Hongrie déclare la guerre à la Serbie. Le processus est enclenché.
Ils ont tué Jaurès !
« Chacun le sait Monsieur Jaurès, c’est l’Allemagne ». – Maurras –
« Herr Jaurès » (La Liberté !). « Le Prussien ! »
L’Echo de Paris va plus loin : « coller au mur le citoyen Jaurès et lui mettre à bout portant le plomb qui lui manque dans la cervelle ».
Les attaques se déchaînent, les tensions augmentent, les rumeurs de guerre enflent; Jaurès ne peut contenir cette montée inexorable.
Après l’attentat de Sarajevo, il fait voter une nouvelle fois, le 14 juillet, par le congrès du parti socialiste une résolution pour prévenir et empêcher la guerre. Il considère particulièrement efficace la grève générale simultanément organisée dans les pays intéressés.
Le 28 juillet l’Autriche-Hongrie déclare la guerre à la Serbie, les 29 et 30 juillet, Jaurès est à Bruxelles à la réunion du Bureau de l’Internationale et appelle, comme tout le BSI, à convoquer le congrès à Paris pour le 9 août. Le 30 juillet, il est de retour à Paris, le 31 il dîne au café du Croissant avec ses amis socialistes. A 21h 40, Jaurès est assassiné.
Ils ont tué Jaurès ! On l’enterre le 4 août. Les socialistes unanimes votent les crédits de guerre. C’est l’Union sacrée ! Son assassin, Villain, sera acquitté en 1919 et Madame Jaurès condamnée à payer les dépens.
L’impôt sur le revenu : un aboutissement et un symbole
De 1872 à 1914 : de l’impôt sur le revenu des valeurs mobilières à l’impôt général sur le revenu.
La loi du 15 juillet 1914 institue à partir du 1er janvier 1915 un impôt sur le revenu, de 2% sur les revenus nets au dessus de 5.000 F ; il frappe les salaires, les traitements, les retraites, les bénéfices des professions libérales, les revenus des exploitations agricoles, industrielles et commerciales, les valeurs mobilières et immobilières, y compris la rente française.
C’est le résultat d’années de discussions passionnées.
En 1907, Caillaux avait fait voter par la Chambre, un projet de loi d’impôt progressif sur le revenu qui avait été repoussé par le Sénat.
Quand la loi est votée, à la veille de la guerre, Caillaux n’est plus au ministère, mais la loi est conforme au projet qu’il a voulu imposer pendant si longtemps. La loi de finances du 30 décembre 1916 mettra en vigueur pour 1917 l’impôt global sur le revenu adopté en 1914.
Le canal de Panama, une leçon d’impérialisme
Après la guerre de Sécession aux États-Unis, Grant avait déclaré : « le canal de Panama doit être un canal américain, construit avec de l’argent américain, sur un sol américain. » Les États-Unis obtiennent une renonciation de la Grande-Bretagne, mais la Colombie a refusé le transfert de la concession des Français aux Américains. La président Théodore Roosevelt encourage la sécession de la province de Panama et reconnaît aussitôt la nouvelle République de Panama.
Les États-Unis obtiennent ainsi une concession à perpétuité sur la zone du canal : ils accordent une annuité à la République de Panama et lui garantissent son indépendance ; ils indemnisent les Français. En contrepartie, ils peuvent agir comme « si ils étaient souverains du territoire », environ 20 km de large – 70 km de long.
Les travaux sont immédiatement engagés par le génie militaire américain et achevés en 1914. Il faut huit heures pour passer d’un océan à l’autre.
1901 : Traité avec la Grande-Bretagne
1903 : Révolution de Panama
18 Novembre 1903 : Traité de Hay-Bunan Varilla
15 Août 1914 : Inauguration du canal de Panama