Dès qu’un projet de développement économique se profile, l’État s’occupe de mettre en place les infrastructures.
– Cités pour accueillir les travailleurs nécessaires, que l’on déplace éventuellement. Dans le Guizhou, le nombre de ces blocs d’immeubles, implantés en pleine nature, est impressionnant. On ne touche pas aux collines : on construit entre les collines. On abandonne les villages, ce qui laisse de la place pour les cultures, entre collines et immeubles.
– Nouveaux villages « authentiques » construits de toutes pièces à côté des villages anciens des minorités. Entre le nouveau village et l’ancien, des portiques avec reconnaissance faciale… On visite le village des minorités comme on visiterait une réserve. Évidemment, toutes ces nouvelles entrées de villages sont des pagodes: le neuf doit imiter la civilisation ancienne. J’ai essayé de me mettre à la place des ces habitants soumis aux regards des touristes. Il y a ceux qui continuent de vivre comme si les touristes n’étaient pas là et ceux qui jouent le jeu de faire le spectacle de la tradition pour que chaque Chinois qui est venu là depuis les autres provinces puisse se prendre en photo devant ces scènes si pittoresques! Le tourisme dans cette région est développé pour les Chinois, pas pour les Occidentaux. Les villageois nous regardaient en riant comme si nous avions des caractéristiques bien spéciales. Dans la queue pour passer les portiques, nous étions une dizaine de Français pour cent Chinois et il fallait parfois jouer du coude si on ne voulait pas attendre son tour très longtemps. Dans tout notre périple, nous n’avons rencontré que dix autres européens.
– Nouveau villages créés pour regrouper les habitats isolés des populations paysannes. Je ne suis pas arrivée à savoir si c’était pour faciliter l’alimentation en eau et électricité ou si c’était pour mieux surveiller, ou pour faciliter les mariages entre communautés Miao et Buyi. J’ai eu toutes les versions.
– Autoroutes, tunnels et ponts, routiers et ferroviaires: un tunnel pour chaque voie. Au long des trajets en car et en train, nous avons dû traverser plus de cent tunnels et franchir autant de ponts. Dans ce pays de montagne, le Chinois ne s’embarrassent pas lacets et de détour, il faut aller vite et de façon sécure à sa destination, donc ils enjambent et ils creusent. À les entendre, leurs ponts et tunnels sont les plus hauts, le plus longs, parfois on rencontre un pont qui bute sur la montagne, le tunnel n’a pas été creusé et un autre pont a été construit à la place…Le pont inutile reste là…en attente d’être un jour utile ou en attente d’être démoli?
Sur les sites touristiques, tout est fait pour aider ceux qui ne peuvent pas monter 6000 marches… ascenseurs, escalator. Sur le site de Huanggoshu, on a emprunté un escalator au dénivelé impressionnant, des panneaux disaient que c’était le plus haut du monde, je ne l’ai malheureusement pas pris en photo, mais je veux bien le croire car on avait des tickets pour le prendre à la descente et à la remontée. Mais au retour, malgré le balisage, j’ai voulu prendre le chemin pédestre, comme les touristes chinois ordinaires et pas comme les privilégiés qui avaient payé leur ticket pour l’escalator, et j’ai bien senti ma douleur aux nombre de marches que j’ai dû remonter à toute vitesse pour être à l’heure au check point, au moins la hauteur de la cascade.
– Les modes de constructions traditionnels n’ont pas disparu: échafaudages en bambou, travail du bois, murs de briques et mètre en bambou. La terre appartient à l’État qui l’attribue à qui souhaite en faire quelque chose: la cultiver ou construire un hôtel, il exempte d’impôt et aide parfois financièrement et bien sûr, touche ensuite sur les bénéfices (je n’ai jamais réussi à savoir par quel mécanisme exactement). Donc si un Chinois construit un hôtel : la terre reste à l’État mais l’hôtel est à lui.