Un dérèglement de tous les sens
1873, Rimbaud a dix-neuf ans, il vient d’achever Une Saison en enfer et fait éditer ce recueil en prose à Bruxelles à compte d’auteur (500 exemplaires), puis s’en désintéresse. Désormais, Rimbaud n’écrira plus.
Tout le monde s’est essayé à justifier, analyser, récupérer Une Saison en enfer. Rimbaud, lui, en a donné l’explication a sa mère. « J’ai voulu dire ce que ça dit, littéralement et dans tous les sens ».
Rimbaud mystique ? L’autorité de Paul Claudel ne suffit pas à convaincre. Trop opposée à l’ordre établi et aux conventions, sa recherche de l’absolu, à la conquête des pouvoirs surnaturels qui doivent le conduire à « l’âme universelle », est loin d’exprimer la pure contemplation.
« Je est un autre ». « Le poète se fait voyant par un long, immense et raisonné dérèglement de tous les sens ».
Le vers libre, un verbe résumant tout. Parfums, sons, couleurs créent la magie verbale, écho de ses hallucinations.
Rimbaud Arthur, poète français
1854 (Charleville) – 1891 (Marseille)
On en a fait un « symboliste » dans le sillage des deux « Dieux » qu’il admirait et qu’il aimait : Baudelaire et Verlaine. Aragon et Breton l’élèvent en monument surréaliste.
On a fait de lui un catholique, lui qui écrivait « M…. à Dieu ! » sur les bancs, un fasciste, un communard, un communiste, un voyou, un héros de la drogue, un mythe.
En tous cas, Rimbaud a tout dit et tout écrit entre seize et vingt ans ; pendant ses dix-sept dernières années, il n’écrit plus : dans les correspondances de sa vie errante de malchanceux, plus rien ne subsiste de l’extraordinaire magie verbale du Bateau ivre, des Illuminations et d’Une Saison en enfer
Au collège, il fait figure d’enfant prodige, on publie ses premiers vers, il obtient un prix. Son professeur de rhétorique Georges Izambard se fait son protecteur et son confident.
En 1870, commence le cycle infernal des fugues, des ruptures et des retrouvailles avec Verlaine, des révoltes.
« Le poète se fait voyant par un long, immense et raisonné dérèglement de tous les sens ». Il veut acquérir « l’âme universelle » pour percer le système des rapports entre le moi et le monde, pour sortir de l’emmurement dans les limites du corps matériel…, pour être un multiplicateur de progrès. « Demandons au poète du nouveau -idées et formes… les inventions d’inconnu réclament des formes nouvelles. »
Ainsi Rimbaud crée cette œuvre fulgurante et puis s’en va à travers le monde, le plus souvent à pied. Il fait tous les métiers : précepteur, chef de chantier, vendeur d’armes, acheteur de café, explorateur !
Il est malade, détroussé, expulsé, rapatrié, malade, accusé, roulé, rapatrié, amputé d’une jambe…et meurt à trente-sept ans.
1870 : A la musique, Le Dormeur du val, Ma Bohème
1871 : Les Assis, Le Bateau ivre (septembre)
1872-73 : Illuminations
1873 : Une Saison en enfer (août, après la rupture avec Verlaine)
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