Les femmes et les enfants après

Le journal La Fronde

Le journal La Fronde

26 janvier 1886 : manifestation des étudiants en médecine contre l’admission des femmes à l’internat.

À partir du milieu du XIXe siècle, dans les lois sur le travail, les femmes et les enfants passent après. Dans les lois sur l’enseignement, malgré les efforts de Camille Sée, l’éducation des femmes reste marginale. Même les intellectuels ne font pas la part belle aux femmes.

L’âge d’or de la vie intellectuelle française : Péguy, les Cahiers de la quinzaine (1900).

« Pour savoir ce qui a paru dans les cinq premières séries des Cahiers, il suffit d’envoyer un mandat de 5 francs à …. ».
On a peine aujourd’hui à mesurer l’importance des Cahiers, qui ont rassemblé, dès la première parution (Janvier 1900), des contributions majeures de poètes, historiens, philosophes, hommes politiques, témoignant de « l’âge d’or de la vie intellectuelle française ».Cette année 1900 est celle de l’Affaire Dreyfus, de la préparation du congrès socialiste national : Jaurès et Anatole France plaident pour le socialisme. Et l’on peut lire le compte rendu de la discussion sur la proposition de loi portant nouvelle réglementation du travail des enfants, des filles mineures et des femmes.
Charles Péguy, l’homme à tout faire, gérant, rédacteur en chef, omniprésent, avait produit en guise d’introduction à ces Cahiers si parisiens la Lettre du provincial.

Millerand, un socialiste réformiste : la journée de 10 heures

Entré en Juin 1899 dans le ministère Waldeck-Rousseau, de sa propre volonté mais fort du soutien de nombreux syndicats dont il avait souvent été l’avocat, le « citoyen-ministre » ne parvient pas vraiment à concrétiser les espérances de réforme sociale qu’il a fait naître.
Pourtant, la loi du 30 mars 1900 doit aboutir en deux ans à étendre, à toute la population adulte des ateliers mixtes, la journée de 10 heures que la loi de 1892 réservait aux enfants et aux femmes.
Dans l’immédiat, elle allonge la durée de la journée des enfants et des femmes, ce qui lui vaut de violentes animosités.
La loi des 8 heures, soit 48 heures par semaine, ne sera votée qu’en 1919.

Féminité et éternel féminin: Manette Salmon, des frères Goncourt

Il peut paraître surprenant que l’œuvre romanesque des Goncourt soit bâtie autour de personnages féminins : les deux frères ont à leur égard un attrait et une répulsion évidentes, et s’efforcent de garder, vis à vis de leurs héroïnes, un éloignement propice à l’observation clinique.
 Manette Salomon est l’antithèse de Madame Bovary. La sensibilité douloureuse de l’artiste en fait la proie d’une femme : maîtresse, épouse et tyran. L’antisémitisme spontané (mais documenté) des Goncourt charge encore le portrait de la femme, mauvaise par nature.
 »Des entrailles de la Mère, la Juive avait jailli. » Les Goncourt resteront comme les créateurs de la « féminité », essence insaisissable de l’éternel féminin.

Les femmes n’ont guère le choix : ouvrières, courtisanes, domestiques ou femmes au foyer. Un transfert de technologie va leur ouvrir une voie royale, jusqu’à la généralisation de l’informatique : Sténodactylographe.

machine à écrire rémington

machine à écrire rémington

– « Chez Remington père  fils, armuriers, que vient-on acheter ? »
. « Des armes et… »
– « Des machines à écrire ! »
. « Ah ! »
– « …parce que les techniques utilisées dans ces nouvelles machines sont semblables à celles mises au point dans les pistolets et les carabines utilisées pendant la guerre de Sécession. Regardez, un cylindre muni des mécanismes permettant l’interlignage, l’espacement des lettres et le retour du chariot. »
. « Mais, il n’y a que des majuscules…et on ne peut pas lire ce que l’on fait. »
– « Un jour, peut-être… »

En attendant, le volume des travaux d’écriture augmentant, la machine trouve ses utilisateurs : des employés sans espoir d’avancement, les femmes et quelques jeunes gens en attente de carrière administrative.

Pour une place de créature libre dans la société: La Fronde (1897)

« Si la France déclare la guerre….c’est aux tyrans qui s’appellent : abus, préjugés, codes caducs, lois arbitraires. »
Deux cent mille exemplaires vendus pour son 1er numéro : La Fronde, premier quotidien dirigé, rédigé, composé exclusivement par des femmes connaît un grand succès. Il durera six ans.
La directrice : une maîtresse femme, Marguerite Durand, ancienne actrice à la Comédie française, excellente organisatrice, journaliste alerte, plutôt radical-socialiste, dreyfusarde.
D’admirables enquêtes ; La Fronde : « réclame l’égalité des droits, le développement sans entraves des facultés de la femme, une place de créature libre dans la société ».
« Jugée trop bourgeoise par les socialistes, trop révolutionnaire par les bourgeois, trop sérieuse par les Parisiens, trop parisienne pour la province. » -Marguerite Durand-

Les malheurs et les misères du peuple et des femmes en particulier

Succès populaire pour le roman de Léon Frapié La Maternelle (1904).
Ce collaborateur assidu de la revue L’Assiette au beurre décrit avec simplicité et justesse la condition de l’enfant dans les faubourgs misérables de Paris.
Une jeune fille aisée, frappée d’une série de malheurs se retrouve femme de ménage dans une école maternelle ; elle aura le temps d’être confrontée aux humiliations et aux souffrances des enfants, et de découvrir les malheurs et les misères du peuple, avant qu’un prince charmant sous les traits du médecin de l’école, ne découvre l’âme et la vraie condition de cette Cendrillon !
Rose, l’héroïne de La Maternelle a inspiré plusieurs films.

Les domestiques
Au XIXe siècle, on ne peut prétendre avoir un rang dans le monde si on n’est pas « servi ». Le domestique est un certificat de bourgeoisie. Le service est aussi différencié que les fortunes et les modes de vie. Dans les grandes maisons de province, dans les hôtels particuliers urbains, la domesticité est nombreuse et hiérarchisée. Les « spécialistes » – maître d’hôtel, cocher, cuisinière, nourrice – indispensables et tyranniques, bénéficient d’un statut relativement privilégié et exercent, sur les « sans grade », une autorité parfois féroce. Du moins ont-ils tous, presque toujours, un logement décent et une nourriture convenable.
Il n’en va pas de même lorsque le « bourgeois », surtout s’il est « petit bourgeois » ne dispose que d’un personnel restreint, voire d’une seule bonne. Les domestiques sont alors relégués dans les chambres dites « de bonne » et la nourriture leur est mesurée.
Les femmes, les plus nombreuses, sont aussi les plus mal loties : jeunes, elles sont la proie de la concupiscence des patrons ou des jeunes gens de la famille ; enceintes, elles sont renvoyées ; de même si elles se marient, parce qu’elles ne seraient plus assez disponibles.
Certes, il existe de « bons maîtres », Marcel Proust en est un exemple, mais la vie des domestiques est généralement plus proche de celle que décrit Zola dans Pot Bouille que de celle de Céleste Albaret.

 

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