Religion et démocratie ne font pas bon ménage

En ces temps de confusions, où des politiques affichent des pratiques anti-laïques sans états d’âme, au nom du vivre ensemble, oubliant la définition de la laïcité, il m’a semblé intéressant d’exhumer des extraits de 1848-1914, un programme que j’ai réalisé pour l’ouverture du Musée d’Orsay sous la direction de Madeleine Rebérioux.

La revue et le mouvement Le Sillon

En 1892, un petit groupe d’intellectuels qui se réunit dans la crypte du collège Stanislas souhaite réconcilier les catholiques avec leur république : « Concilier le spiritualisme chrétien et les revendications populaires pour la justice sociale », et prend position contre le capitalisme et le patronat.

C’est un brûlant foyer d’engagement intérieur, car Sangnier ne croit qu’à l’éducation de l’âme : fondateur de la revue Le Sillon en 1894 et du mouvement du même nom en 1895, il en canalise ainsi les enthousiasmes, mystiques et moraux.

Les autorités religieuses, d’abord favorables, s’inquiètent de l’amalgame dangereux entre religion et politique. Sangnier, en proie aussi à des contradictions internes dans la définition de son engagement politique, se soumet et dissout Le Sillon, en 1910, à la suite de sa condamnation par le Saint-Siège.

Sangnier Marc, journaliste et homme politique français

1873 (Paris) – 1950 (Paris)

fondateur de la revue Le Sillon
Marc Sangner

« Jésus seul a fondé, lui seul maintient le principe démocratique. »

Toute sa vie, ce fils de la grande bourgeoisie très catholique, mettra sa foi au service de la République et de la démocratie. II veut réconcilier l’Eglise avec le monde moderne dans le digne chemin de l’encyclique « rerum novarum » et l’esprit de ralliement à la République.

Sangnier voit dans la démocratie le système politique qui suppose, pour être efficace, la pleine responsabilité des citoyens et la pratique de vertus qui sont chrétiennes. Il se consacre à cet apostolat social : rapprocher le favorisé et le démuni par l’entraide et le développement de l’éducation.

L’anticléricalisme de Combes d’un côté, les attaques de Maurras de l’autre, poussent chacun vers les extrêmes : les autorités ecclésiastiques finissent par condamner ouvertement le mouvement, l’accusant d’inféoder la religion à un parti politique et de convoyer le socialisme. Sangnier dissout Le Sillon.

Mais fidèle à sa foi, il poursuit son action politique en créant la Jeune République, parti démocrate chrétien, en poursuivant après la guerre une action pacifiste, en fondant la Ligue française des auberges de jeunesse, en soutenant le Front populaire, et prêtant son imprimerie à des mouvements de résistance. Il sera président d’honneur du MRP (Mouvement Républicain Populaire) en 1946.

1892 : Cercle chrétien de la crypte

1894 : fondation de la revue Le Sillon

1895 : fondation du mouvement Le Sillon

1906 : dilemme Sangnier-Maurras

1908 : fondation du journal : La Démocratie

1910 : condamnation par Pie X

1912 : création du mouvement Jeune République

1919-24 : député

1930 : Ligue française des auberges de jeunesse

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