La prière et la glossolalie

Dessin de Jérôme Lefranc

Dessin de Jérôme Lefranc

Vous arrive-t-il de prier? Sincèrement, vous en attendez quoi à part que le fait de formuler vos angoisses peut vous aider. Avez-vous déjà eu l’impression d’entrer en rapport avec une divinité. Savez-vous que l’on a précisément identifié les troubles mentaux responsables des Voix qu’entendent certaines personnes (Jeanne d’Arc par exemple).

La prière est une invocation à caractère collectif ou privé destinée à obtenir directement ou indirectement la protection d’une divinité et plus globalement, à entrer en rapport avec elle. Nos questionnements sur nos origines, notre devenir, la mort incitent nécessairement à la méditation et le refus d’un destin tragique incite naturellement à la prière sans pour autant que l’on sache qui et quoi prier!La prière peut être

– un appel direct si on s’adresse explicitement à un dieu détermine, dénommé;

– un appel indirect lorsqu’on s’adresse à une puissance obscure, inassignable, vers l’au-delà, l’occulte ou encore lorsqu’on recourt à l’intercession d’un personnage, par exemple dans le christianisme, un saint, la Vierge Marie.

La prière peut avoir une intension défensive, éviter ou écarter un mal ou un malheur pour soi-même ou pour les siens, une intention positive pour la réalisation d’un voeu, d’un désir, d’un espoir, mais aussi une intention quasi communielle de rapport au divin dans un mélange de sentiments d’exaltation, d’humilité et de vénération.

Les rituels de prières ont le plus souvent un caractère collectif, cérémonies religieuses, prières publiques pour des deuils ou certaines épreuves qui affectent la communauté (famine, guerre, catastrophes naturelles). Les conduites des prières sont variées et oscillent entre une forme ostentatoire ou discrète, voire secrète.

Dans le premier cas on observe des pratiques gestuelles et vocales, prosternations, génuflexions, implorations, lamentations, etc.

Dans le second cas, avec les processus d’intériorisation et de spiritualisation selon une définition du mystique Grégoire de Nyssé, la prière devient un échange confidentiel entre l’âme et Dieu.

Dans les sociétés laïques, déchristianisées, la prières n’est jamais ritualisée de façon explicite (sauf aujourd’hui avec l’arrivée en force de l’intégrisme musulman). Elle peut pourtant intervenir de façon latente dans certaines cérémonies, à l’occasion de phases de recueillement, ou régulièrement pour les musulmans pratiquants.

Dans la vie privée, beaucoup d’adultes, au moment d’une épreuve ou d’une grande angoisse, retrouvent l’attitude et les paroles des prières de leur enfance. Même ceux qui n’ont pas reçu d’éducation religieuse peuvent émettre une imploration confuse ou prendre du temps pour méditer.

La glossolalie est une pratique qui remonte à une trentaine d’années, elle est apparue dans les mouvements religieux charismatiques et néo-pentecôtistes qui ont émergé à la lisière des églises officielles. Au cours de leurs réunion de petits groupes ou de leurs rassemblement massifs, ils recourent non seulement à la libre parole mais à un mode d’expression non verbale, irruptif et disent-ils, inspiré par l’esprit saint.

Les glossolalies consistent en des émissions vocales, modulées dans l’intonation mais non verbalisées. Elles sont initiées par un fidèle, puis reprises par d’autres en alternant répétition et improvisation. Les analyses qui en ont été faites n’ont pu dégager aucun langage connu sous-jacent. Elles n’en prennent pas moins pour leurs émetteurs un sens profond de rapporte à Dieu et d’expression symbolique des sentiments à son égard. Cela dans un climat d’exaltation communielle ou simplement d’euphorie collective (nous ne faisons rien qui nous divise et nous nous unissons à Dieu!)

On peut rapprocher de phénomène de la transe; il est lié comme elle au désir d’accès au sacré et à la pression contagieuse du groupe, mais les glossolalies sont moins intenses que la transe.

Son apparition en France a coïncidé avec l’éviction de la liturgie latine dans les cérémonies religieuses catholiques. On peut ainsi faire l’hypothèse que les glossolalies viendraient relayer ce support fantasmatique d’une langue obscure et psalmodiée dont l’Église a curieusement méconnu la portée au profit d’une modernité plus rationnelle.

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