Savoir se réconcilier
Le pont est un beau symbole de la réconciliation. Le comportement agressif et la confrontation sont des caractéristiques fondamentales et inévitables des êtres vivants, animaux ou humains; mais faire la paix est aussi naturel que faire la guerre: savoir se réconcilier est aussi nécessaire que de savoir sanctionner, pour maintenir de bonnes relations sociales et pour éviter la guerre, c’est à dire la punition et son cortège d’humiliations.
Je vous conseille vivement la lecture du livre passionnant De la réconciliation chez les primates, de Frans de Waal
Dans la cour du collège, un « grand » s’en prend violemment à un plus petit. Vous êtes professeur et vous traversez la cour pour vous rendre dans votre salle de classe. Vous assistez à la scène en passant. Qu’allez-vous faire?
Je signale le fait au CPE (Conseiller Principal d’Education) et je vais à mon cours.
Vous semblez disposé à ne pas laisser faire n’importe quoi autour de vous sans réagir. Mais vous ne vous donnez pas pour autant tous les moyens pour agir efficacement ! Vous comptez un peu trop sur les autres, non ? En restant à distance il y a des enjeux qui vous échappent, et votre non-engagement ne passera pas inaperçu. Votre bonne conscience peut passer pour peu exigeante et votre maîtrise des émotions pour de la froideur : ce serait injuste ?
Je m’interpose entre les deux élèves et j’avertis l’élève de 3e qu’il sera collé trois heures le mercredi suivant. Je lui dis que je ne supporte pas qu’on s’attaque à un plus faible que soi.
Je laisse : c’est le boulot des CPE et des aides-éducateurs. Si les professeurs devaient s’occuper de ce qui se passe dans la cour, on n’en finirait pas !
Je m’approche et je fais la morale à l’élève de 3e. « Ce n’est pas bien de taper les plus petits que soi… Cela ne se fait pas… Tu es assez grand pour comprendre… Ne recommence pas !
Je m’approche, rappelle à l’élève de 3e l’interdiction de se battre et la sanction prévue dans ce cas. Je demande aux deux garçons de venir dans le bureau du CPE à la fin des cours et je vais signaler l’incident au surveillant.
Quelques solutions Pour combattre efficacement la violence:
– Une équipe éducative cohérente qui agit en concertation. Seule la prise en charge collective des désordres quotidiens peut contrecarrer l’irruption de délits plus graves. La détermination du groupe doit faire échec à la loi du plus fort. Pour des actes graves, rappeler la loi, en dramatisant parfois, peut être d’une réelle efficacité. En effet, la moitié des mineurs admonestés par le juge des enfants ne récidivent pas.
– La médiation est l’intervention d’une tierce personne pour établir, ou rétablir, la communication entre les protagonistes. Le médiateur n’a pas pour fonction de définir un gagnant et un perdant, comme peut le faire le juge ou l’arbitre, mais de renouer les fils pour que les parties en présence retrouvent la maîtrise de « leur » conflit et tentent elles-mêmes d’y apporter une solution.
– Le théâtre-forum amène les participants à identifier les moyens dont dispose un être humain pour apprivoiser sa propre peur et prendre confiance en lui-même dans les situations d’oppression. Sous la conduite d’un animateur, les spectateurs interviennent dans la résolution du problème proposé en prenant la place d’un des acteurs.
Attitudes appropriées devant la violence à l’école
– Faut-il réellement attacher de l’importance à une simple bagarre entre élèves ? OUI
Il peut s’agir d’un fait grave, peut-être une intimidation liée au racket. L’élève de 6e ne doit pas être moins considéré que l’élève de 3e qui est plus grand et qui a plus d’expérience dans l’établissement.
– Dans le cas d’actes de violence, le règlement intérieur doit-il prévoir les actions à mener et les sanctions en cas de transgression ? OUI
Il est indispensable que l’ensemble de la vie de l’établissement scolaire soit régi par des règles que les élèves doivent connaître. Leur respect permet de donner à chacun sa part et à chacun sa place. Le comportement violent doit être sanctionné au même titre que le vol ou les dégradations de matériel.
– La lutte contre la violence à l’intérieur de l’établissement scolaire concerne-t-elle aussi les enseignants ? OUI
Il est fondamental que l’élève se sente protégé à l’école. Trop d’enseignants sous-estiment l’importance de leur rôle dans la lutte contre la violence. Le professeur de par son statut est garant des règles de l’établissement. Toute l’équipe éducative doit se sentir responsable pour faire respecter les lois.
– Le non-respect des règles doit-il donner lieu à une sanction ou à une punition ? UNE SANCTION ÉVIDEMMENT
Effectivement, il ne peut y avoir de loi sans sanction. La sanction est mieux adaptée que la punition car elle est en rapport avec la loi enfreinte. Elle a pour but de faire comprendre et respecter les interdits notamment ceux qui sont fondamentaux comme l’interdit de violence. Au contraire la punition risque d’être disproportionnée par rapport à la transgression. Elle est empreinte de l’idée de vengeance.
– Est-ce à l’enseignant de réagir face à cette agression ? OUI
Il serait dangereux de banaliser et de ne pas sanctionner ces comportements. La lutte contre la violence c’est l’affaire de tous. Il est fondamental que l’élève se sente protégé à l’école. Toute l’équipe éducative doit se sentir responsable pour faire respecter les lois.
– Est-il indispensable qu’il y ait des règles pour régir la vie de l’établissement ? OUI
Les règles doivent être connues et expliquées aux élèves. Il est important de faire comprendre au jeune que les actes violents sont interdits parce que c’est une règle indispensable pour vivre en société et que la sanction ne dépend pas de la sensibilité de la personne qui la donne.
– La punition donnée par le professeur doit-elle correspondre à la faute commise ? OUI
Attention, il arrive souvent que la punition donnée sur le coup de l’émotion ne tienne pas compte du contexte. Était-ce du racket ou le plus jeune avait-il insulté le »grand’ auparavant ? Il est important de permettre aux deux protagonistes de s’expliquer (peut-être séparément) pour sanctionner ensuite en connaissance de cause.
Il est capital de faire la différence entre sanction et punition

Les hommes politiques, les professeurs, les parents, les juges et les policiers devraient faire ce test!
Devant une situation où l’on se sent agressé, bafoué ou humilié parce que « l’autre » a enfreint une règle, ou une loi, il est parfois difficile de se contrôler pour prendre la bonne décision.
“Dire non, c’est exister soi-même et faire exister l’autre.” (Jacques Lacan).
La règle n’a de raison d’être que si elle est respectée, et, pour que la loi soit appliquée, il faut qu’elle soit comprise et que des sanctions soient prévues.
Si la loi n’est pas respectée, la porte est ouverte à la violence. Qui est capable en toutes circonstances de se maîtriser, d’avoir une attitude sociale, d’écouter, de réparer ou de se réconcilier s’il s’est emporté ou mal comporté ou encore de se tenir à distance s’il ne se sent pas capable de se maîtriser?
Comment gérer ses émotions, choisir entre raison ou passion ? Pourtant, on se doit d’exprimer son mécontentement, mais comment, sans agresser l’autre ? Faut-il sanctionner ou punir?
Une punition est un châtiment sans rapport avec la faute.
Elle est souvent donnée impulsivement dans l’émotion et empreinte de l’idée de vengeance.
La sanction, elle, est une peine ou une récompense prévue pour assurer l’exécution d’une loi.
C’est souvent une réparation.
La punition fait mal, la sanction fait grandir.
« Une part de nous est dans l’émotion mais nous sommes bien autre chose. Nous sommes une personne qui peut décider de poser des actes en fonction de ses valeurs. » (L’intelligence du cœur, Isabelle Filliozat).
Interrogez-vous sur votre attitude et ses conséquences…
Faites-vous la différence entre sanction et punition?
Vous devez partir et pour la deuxième fois, la même voiture est garée devant votre garage, vous empêchant de sortir. Que faites-vous?
Discrètement je crève un pneu. Je suis sûr qu’ainsi le propriétaire ne remettra pas sa voiture à cette place.
J’appelle la police pour qu’elle amène la voiture à la fourrière.
L’autorité et la loi. Vous privilégiez les rapports de force. Volontiers autoritaire, vous utilisez la loi comme un moyen d’obtenir ce que vous voulez. Le recours obstiné à ce que vous appelez vos droits rend les discussions avec vous difficiles. N’avez-vous pas peur de vous retrouver démuni dans un face à face sincère ?