L’Ève future
paraît pour la première fois en feuilleton en 1880 et est édité le 13 mai 1886.
« Essayons de changer de mensonges! Ce sera plus commode pour elles et pour nous. Bref, si la création d’un être électro-humain, capable de donner un change salubre à l’âme d’un mortel, peut être réduite en formule, essayons d’obtenir de la science une équation de l’Amour, qui d’abord, ne causera pas les maléfices démontrés inévitables sans cette addition ajoutée, tout à coup, à l’espèce humaine, et qui circonscrira le feu ».
C’est le rêve archaïque de l’homme artificiel transposé comme rêve de raison. Les nouvelles techniques, les progrès de la science y sont tremplin d’un imaginaire plus ancien, nouveaux instruments des magies du passé. L’androïde, machine à figure humaine, création artificielle, qui après avoir été automate va devenir le robot, est le produit d’un curieux mélange de spiritualisme et d’absence de Dieu, de peur et d’espoir.
Villiers de l’Ile Adam fait jaillir de son imagination l’androïde le plus célèbre du XIXe siècle : La Femme de l’avenir, l’Ève future, ange automate hermaphrodite et stérile, remède définitif et ironique aux souffrances fatales des amours humaines. C’est dans la propriété d’Edison, devenu héros du roman, qu’aura lieu la création de cet être nouveau dont la froideur a la beauté et la perfection glacée de l’Idée. Cette parfaite réplique physique de la maîtresse qui a trompé le jeune Anglais, ami d’Edison, aura sa beauté, mais n’aura pas son âme basse et son intelligence vulgaire, son âme sera exquise. Mais la femme idéale ne peut être étreinte ni aimée, elle est stérile et elle doit retourner à son cercueil, son écrin véritable.
L’Ève future est un roman paradoxal, scientiste et désespéré, une manière de rire de soi, de l’amour, de la science, une manière rêveuse de croire à cette anti-croyance (la Science), de diviniser cette absence de Dieu. La plénitude est pour Villiers de l’Isle Adam la perfection même qu’on ne trouve qu’au coeur du néant.
(d’après Juliette Grange, l’ange automate)
Les avatars aujourd’hui prennent la place des robots dans l’imaginaire collectif, bien plus puissants puisque, derrière eux se cachent des humains véritables qu’on ne rencontre pas, que l’on peut imaginer, à qui l’on peut dire ce qu’on veut en toute impunité. Entre avatars, pas de communication non verbale, celle avec laquelle on ne peut pas tricher, entre avatars, tous les mensonges sont permis.
« Essayons de changer les mensonges » disait Villiers de l’Isle Adam, voilà qui est fait!
Villiers de l’Isle-Adam Jean Marie Mathias Philippe Auguste, comte de, écrivain français
1838 (Saint-Brieuc) – 1889 (Paris)
« La langue vraiment d’un Dieu partout » – Mallarmé -. Villiers appartient à l’une des familles les plus anciennes de l’ancienne France, mais ruinée. Toute sa vie, il croit que la fortune et la gloire lui reviendront, qu’il les mérite et qu’il les atteindra par la plume. Sa famille, ses amis sont persuadés de son génie.
« Le jeune homme le plus magnifiquement doué de sa génération. »
Sa jeunesse, son adolescence sont solitaires, sensibles, anxieuses : l’apprentissage du poète tel que le chantait Musset – repli dans son monde intérieur – amours mystérieuses et malheureuses ; la pureté et la mort ; la sensualité et la trahison.
Venu à Paris en 1857, Villiers se lie avec Baudelaire, Vallès, Banville, Courbet, Manet, Mendès : il collabore à la Revue Fantaisiste. Replié en province, il publie en 1859 ses Fantaisies nocturnes. Il lit avec passion Edgar Poe et Hegel, se prépare à une vie d’écrivain, et s’installe de nouveau à Paris. « Une série d’œuvres où le rêve se baserait sur la logique, une littérature philosophique qui rénoverait les idées ».
Son premier roman Isis annonce ses ambitions. Mais le succès ne vient pas. Ellen, Morgane sont encore des échecs, comme La Révolte, comme Axel, le grand œuvre, dont la première partie paraît en 1872, la seconde en 1885. Les Contes cruels, L’Eve Future lui valent l’estime mais non la gloire. Malgré son génie, Villiers n’a pas su faire triompher la « lumière du rêve » face « aux ténèbres du sens commun »; il est pourtant un des précurseurs du symbolisme.
1862 : Isis, roman philosophique
1865 : Ellen, drame
1866 : Morgane, drame
1883 : Contes cruels
1872, 1885 : Axel
1886 : L’Ève future
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Avatar : du mot sanscrit signifiant descente, nom générique des incarnations divines, de Vichnou en particulier; par extension, transformation, métamorphose.
C’est aussi le titre d’un roman publié en 1932 par Théophile Gautier.
Aujourd’hui, en informatique, il se rapproche de son sens original, en désignant l’apparence que prend l’internaute sur la toile, dans des jeux ou des forums. Ainsi l’internaute peut intégrer, avec son avatar, un univers créatif et diriger sa propre identité virtuelle, s’immerger dans des expériences.
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