Le XIXe siècle tout entier croit en la force des images et en la vertu éducatrice du monument. On se rassemble avec ferveur autour des nouveaux symboles politico-religieux. En 1789, en 1830, en 1848… d’abord autour des arbres de la liberté, puis autour du drapeau tricolore, adopté par la Convention montagnarde, puis par le roi de France, et maintenu par Lamartine. La Marseillaise, chant de guerre pour l’armée du Rhin, redevient hymne national en 1879. Il sera chanté dans toutes les grandes circonstances heureuses ou malheureuses, et notamment le 14 juillet, fête nationale depuis 1879. Mais le symbole par excellence de la République, c’est Marianne. Destinée à remplacer l’image du Roi dans un État devenu anonyme et abstrait, propre à s’opposer à la grande image de Marie, Marianne, Liberté portant torche et flambeau, ou militante, portant pique et bonnet phrygien, ou encore sage et apaisée, debout, drapée à l’Antique, symbole du régime politique établi, et de la patrie. Marianne enfin, comme tous les symboles républicains, passe du militantisme à la banalisation, tandis que la République rentre dans les mœurs.
Une grande fête politique devenue une grande fête populaire, le 14 juillet
Grévy président ! La République républicaine triomphe enfin, mais c’est un triomphe qu’il faut affirmer et ancrer dans la conscience collective d’un peuple à l’esprit encore empreint de monarchisme et de cléricalisme.
En 1880, c’est sans fracas que les députés ont décidé de la fête et choisi sa date : le 14 juillet. Juillet, août, septembre fourmillent de dates révolutionnaires. Trop de mémoires, pas de mémoire. Et puis que fêter ? 1789,1792,1793 ? La date anniversaire de la prise de la Bastille est choisie pour ses symboles : la chute du despotisme et de l’arbitraire, mais aussi le patriotisme et le rassemblement des Français autour de la République.
Longtemps, le 14 juillet reste une fête politique et militante, avant d’entrer dans les mœurs et de devenir simplement populaire.
Le concours pour la figure peinte de la République française, lancé en 1848, échoue lamentablement.
L’hymne de la Révolution devient l’hymne de la patrie
« Cri de vengeance et d’indignation d’un peuple qui non plus qu’il y a 25 ans ne pliera le genou devant l’étranger…émané d’une nation souveraine qui a la passion de l’indépendance et dont tous les fils préfèrent délibérément la mort à la servitude… affirmation volontaire de l’unité française. » -Raymond Poincaré-, le 14 juillet 1915.
Du chant des volontaires chanté en 1792 au décret du 26 Messidor An III qui le consacre hymne national, la Marseillaise subit quelques vicissitudes pendant les régimes monarchiques et impériaux ; mais le décret n’est pas abrogé. Aussi, l’hymne, point de ralliement des subversions et des révoltes depuis la Révolution, fait une rentrée discrète le 14 février 1879 lors d’une séance, qu’on dira plus tard historique, parce qu’elle confirme son statut de chant national.
On essaie d’oublier ses vertus révolutionnaires et de ne lui plus prêter que des vertus guerrières, celles du chant de Valmy. La Marseillaise devient ainsi l’hymne de la patrie. Aussi l’usage qui en est fait, officiel, militaire, nationaliste, a-t-il pour résultat qu’elle est combattue par la classe ouvrière.