La mécanisation prend des allures différentes aux États-Unis et en Europe. L’Europe commence par la mécanisation des tâches simples (filature, tissage, métallurgie). L’Amérique, elle, s’attaque à la mécanisation des métiers complexes comme ceux de l’agriculture dans un souci d’économiser la main-d’œuvre. On assiste alors au passage d’une vie quasi primitive à un stade avancé de mécanisation.
La motorisation, avec la machine à vapeur, dès les années 1820, puis avec les moteurs électriques, permet à la machine-outil de donner réellement sa mesure en multipliant par 100 à 1000, par rapport à la force musculaire, la force utilisable.
Les machines à vapeur classiques consomment, dans les années 1850, 4 kilogrammes de charbon par force de cheval et par heure. Les applications industrielles s’accommodent plus ou moins de ce fardeau que représente le combustible nécessaire à ces monstres, mais il représente un frein à la motorisation de la locomotion, en particulier à celle de la navigation. La recherche de nouveaux moteurs devient une priorité.
On mesure l’importance des établissements industriels, et donc des nations, au nombre d’appareils à vapeur qu’ils emploient. A partir des années 1850, le nombre des machines à vapeur et des moteurs dans le monde fera plus que doubler tous les dix ans. En 1881, la France utilise 44 010 machines de toutes sortes, chaudières et récipients à vapeur, et 49 444 chaudières motrices dans 35 712 établissements.
A la même époque, les groupes d’industries qui consomment le plus de force motrice sont :
– usines métallurgiques : 117 088 chevaux-vapeur,
– tissus et vêtements : 108 355,
– mines et carrières : 90 189,
– industries alimentaires : 87 046,
– bâtiments et travaux : 46 629,
– agriculture : 42 092.
Derrière ces chiffres se cachent de fortes disparités régionales, avec une prépondérance industrielle pour les départements du Nord et de la Seine, puis de ceux de la Saône-et-Loire, de la Loire et du Rhône.
Les premières moissonneuses
Une heure pour faire le travail d’une journée d’un ouvrier faucheur habile
La main d’œuvre, surtout aux États-Unis, devient de plus en plus exigeante à des prix excessifs ; s’il existe des freins à la mécanisation dans ce pays de grands espaces et d’hommes à la conquête de leur sol, ils sont vite balayés par le sens pratique. C’est donc là que se développent les premières moissonneuses fabriquées dès 1846 par l’américain Mac Cormick et présentées à l’Exposition universelle de Londres en 1851. Elles exigent un homme sur la machine pour faire la javelle ; après le passage de la machine, pour ramasser et lier les javelles, la main d’œuvre réclame le même prix que pour le travail complet. Les exploitations du nord de la France utilisent rapidement faucheuses et moissonneuses.
En 1877, la moissonneuse-lieuse américaine Osborne est présentée à l’exposition agricole de Vincennes. En 1885, la moissonneuse-lieuse de MM. Hornsby et fils, présentée à la société d’encouragement « permet d’obtenir d’un seul coup, la récolte des céréales en gerbes égales, solidement liées au moyen d’un mécanisme rappelant celui de la machine à coudre et disposées parallèlement sur le sol… La moisson peut se faire par un seul homme monté sur la moissonneuse traînée par deux chevaux ; chaque machine peut faire un demi hectare par heure soit le travail d’une journée excessive d’un ouvrier faucheur habile… ces machines forcément délicates et compliquées dont les organes sont animés d’une grande vitesse, exigent des soins particuliers qui nécessitent une certaine intelligence de la part des conducteurs. »