La rouelle sur le chemin de l’étoile

Le Rire 1897.-Dessin de Bob.-La Troisième république convalescente, retrouve avec joie des petits rats chéris, qu'elle adore et qui la grignotent tant qu'ils peuvent. Ah! si Drumont n'était pas là!... Quelle noce on ferait!...

Edouard Drumont

L’antisémitisme en France ne naît pas au XIXe siècle ; les regains de nationalisme et de xénophobie aident sa résurgence. Drumont dans son livre La France juive fait la synthèse des différents aspects de l’antisémitisme, qui gagne une partie des Français après la défaite de 1870 et prétend y décrire la « conquête juive ».« Maître de la finance, le Juif est la cause de la misère ouvrière, de la déchéance de la petite bourgeoisie. Il a inventé le système capitaliste, la révolution, qui ont détruit les structures traditionnelles. » L’antisémitisme sous tous ses aspects : nationaliste, chrétien, anticapitaliste. Toutes les classes sont concernées ; elles souffrent toutes par la main juive. « Les juifs ont créé une question sociale, on la résoudra sur leur dos. »
Drumont va plus loin ; il réclame le retour à l’ancien régime, appelle le justicier « qui, au lieu de frapper sur les pauvres ouvriers, frappera sur les juifs cousus d’or. » Il souhaite enfin leur faire porter la « rouelle jaune » (déjà !) et préconise même l’élimination pure et simple. Le livre a, à l’époque, beaucoup de succès.

 

Edouard Drumont

Edouard Drumont

L’antisémitisme eu XIXe siècle

En Allemagne, en 1880, 225 000 personnes signent une pétition demandant la mise en quarantaine des juifs.
« La ville offrait un aspect inhabituel. Les rues étaient parsemées de plumes d’édredon et de meubles, dans les maisons, portes et fenêtres avaient été défoncées » (Russie, premier pogrom à Kiev, mars 1881).
« Berthe, cuisinière pour rôtir les juifs : 1 franc » (France, souscription pour le monument Henry, 1898).
Ces trois manifestations d’antisémitisme dans trois pays différents s’expliquent par le refus d’un certain monde moderne, par la crainte suscitée par les mutations en cours, mais la force et le danger de l’antisémitisme (le mot apparaît en 1873) tient à son existence séculaire : c’est la haine et la peur du juif déicide. « S’il est d’un bon chrétien de détester les juifs, alors nous sommes tous des bons chrétiens » -Erasme-. C’est aussi la dénonciation médiévale des juifs manieurs d’argent. En France, Toussenel les accuse dans son livre d’être « les rois de l’époque » (1846). Leur solidarité par dessus les frontières est, elle aussi, dénoncée (les Rotschild).
Enfin, c’est la vigueur du nationalisme dans lequel les théories raciales s’infiltrent. En France, l’Affaire Dreyfus révélera la force du lien entre la peur et la haine des étrangers et l’antisémitisme. La thèse de la conspiration judéo-maçonnique internationale brasse tous ces antisémitismes (juifs et francs-maçons apatrides à la conquête du monde).
Les ripostes à l’antisémitisme sont modestes chez les non-juifs. Les notables juifs sont souvent partisans du silence et attendent que l’orage passe. Minoritaires sont ceux qui, avec Herzl, commencent à prôner un état juif et ceux qui voient dans l’engagement aux côtés de la révolution socialiste, le seul espoir.

Edouard Drumont

Edouard Drumont

Drumont Edouard, homme politique français
1844 (Paris) – 1917

D’une famille de paysans-artisans, Edouard Drumont est d’abord employé à l’Hôtel de ville, puis journaliste et auteur d’ouvrages historiques. Très attaché aux traditions catholiques et monarchistes, il pratique ensuite une sorte de populisme : « J’ai voté constamment avec l’extrême-gauche pour toutes les mesures qui constituaient une réforme sociale », mais un populisme fortement teinté d’antisémitisme. Antidreyfusard notoire, il écrit avant l’affaire Dreyfus un livre qui le rend immédiatement célèbre La France juive, dans lequel il rend les juifs responsables de tous les maux et de toutes les crises du XIXe siècle. La haine du financier juif s’y exprime exagérément : « Le capitalisme est à la propriété ce que Caïn est à Abel. »
Dans son livre La Fin d’un monde, il stigmatise la dissolution de la société bourgeoise, se fait le porte-parole de la petite bourgeoisie secouée par les transformations économiques et sociales et en proie à l’angoisse de l’avenir. La Libre Parole, son journal porte-voix, est vendu en 1919 et Drumont finit sa vie ruiné.

Journaliste catholique, collaborateur à L’Univers de Veuillot
1886 : La France juive (Essai d’histoire contemporaine)
1888 : La Fin d’un monde
1892 : fondation de La Libre Parole, quotidien antisémite
1896 : De l’or, de la boue et du sang qui fait allusion au scandale de Panama
1898-1902 : député d’Alger

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